IL FAUT ROMPRE À TOUT PRIX CE CERCLE RESTREINT DE SONS PURS ET CONQUÉRIR LA VARIÉTÉ INFINIE DES SONS-BRUITS. |
Titre SACEM : Juste avant que les voisins n’interviennent.
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Composition électroacoustique pour : Un Escalier Métallique tapé, percuté, frappé, cogné, tambouriné, un texte aléatoirement généré surtout incompréhensiblement mixé et divers traitements sonores dynamiques et esthétiques.
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Le 11 mars 1913 fut édité «LʼArte dei rumori (l’Art des bruits)» de Luigi Russolo , Milan, Edizioni Futuriste di “Poesia”. C’est une des toutes premières manifestations de la musique concrète plus tard nommée par Pierre Schaeffer. « Nous avons tous aimé et goûté les harmonies des grands maîtres. Beethoven et Wagner ont délicieusement secoué notre cœur durant bien des années. Nous en sommes rassasiés. C’est pourquoi nous prenons infiniment plus de plaisir à combiner idéalement des bruits de tramway, d’autos, de voitures et de foules criardes qu’à écouter, par exemple, “L’héroïque” ou la “Pastorale”… La suite du texte >>>> et sa délectation !!!
C’est avec une jouissance absolue que je me suis mis à cogner cet escalier de fer… Les sons émis sont fantastiques, puissants et riches d’une harmonie particulière. Un peu comme un peintre du XVIe siècle, je prépare mes couleurs. Les mailloches sont les pilons de mortiers dans lesquels j’opère une chimie bruyante, dont les déflagrations, conflagrations, explosions, pétarades, murmures, marmonnements, bruissements, grommellements, grognements, les stridences, craquements, bourdonnements, cliquetis, piétinements des marches emplissent peu à peu les fioles virtuelles d’une manufacture acoustique dématérialisée. Le classement par nuances des résultantes « tintamarresques » de ces collisions s’accomplira plus tard sur le rayonnage discret d’un calculateur idoine avec cette méthode concernant la disposition des denrées dans une épicerie fine napolitaine. Ensuite, il va falloir « peindre » cette musique, c’est-à-dire disposer par touches et strates les objets sonores sur une toile numérique. Cette tâche va utiliser les « qualités » des matériaux enregistrés, matériaux dont la « qualité » fondamentale est de n’être rien en dehors de ce qu’ils sont réellement : les sons émis par un escalier martelé. Ils vont, dans un premier temps, être confrontés à l’imagination chaotique, exploratrice des émotions induites par les sensations auditives sur l’organe de l’ouïe et, dans un second temps, à la réalité de la construction « matérielle » de la composition, avec ce qui existe et ce qui reste à imaginer. Deux étapes qui vont transformer les objets esquissés en une proposition d’espace émotionnel, espace que l’auditeur choisisse ou non d’explorer. S’il accepte, peut-être y trouvera-t-il un nouveau territoire digne d’intérêt. Pour comprendre le passage délicat des objets sonores à l’assemblage phonique et enfin de l’assemblage phonique à la composition finale, on peut imaginer un collage ou un photomontage quand certaines couches se superposent laissant entrevoir une partie de celles sises en dessous. Qui est-ce qui donne le choix de cet ordre, et pas un autre, dans cette structure d’alogique musicale où tout se mélange et tout peut être perdu ? Il semblerait qu’une mystérieuse substance inaudible se soit faufilée dans cet arrangement l’enforcissant comme la matière noire dans l’univers. Quant au titre de l’article, « juste avant que les voisins n’interviennent », celui-ci se justifie, car les voisins, de braves gens, se sont lassés des sons, qui, portés par un mur peu coopératif à la création, ont envahi leur salon perturbant un tantinet la conversation et le sommeil de leur descendance encore insensible à l’art des bruits : comme quoi la valeur attend un peu le nombre des années. La réaction soudaine ferme, mais polie mit fin au supplice de l’escalier malicieusement nommé, ici, escadrin ! Merci à Ingrid Tedeschi de m’avoir autorisé à torturer son escalier ! |
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« Les machines écoutent différemment de l’homme.
Leur champ d’audibilité est exceptionnellement vaste.
Elles sont douées d’une grande sensibilité et n’opèrent aucune sélection…»
Voir et écouter cette musique…Sans détour : écouter la musique sur les minuscules haut-parleurs d’un ordinateur revient à lire un roman à travers une passoire !
Les objets sonores sont complexes et portent en eux un idéogramme composé d’harmoniques.
L’enregistrement, la composition et le mixage de ces sons ne se sont pas faits au hasard.
Depuis 1997, j’utilise systématiquement des machines à « voir le son ». C’est passionnant et les affichages permettent de voir ce que l’on n’a pas entendu…
Lors du mixage, c’est un peu comme quand on écrit un texte : on ne voit pas les fautes tant nous les avons sous le nez.
Ces machines servent à assister la surveillance d’une grammaire sonore, mais la correction n’est pas automatique… Tant mieux !
J’en profite pour saluer Monsieur Joseph Fourier et ses travaux sur la décomposition de fonctions périodiques en séries trigonométriques convergentes, appelées séries de Fourier qui adaptées à nos calculateurs (FFT), permettent, entre autres, ces visualisations. |
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Cliquer sur les images pour les agrandir
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Spectrogramme : Analyse tonale |
Analyse spectrale : Moyenne exponentielle infinie ( Fenêtre de Hann ).
Résolution : -100 dB. Pour une visualisation de la « couleur » de l’enregistrement.
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Analyse spectrale tridimensionnelle de l’œuvre :
Résolution : -12dB à -96dB – Moyenne Canal gauche + Canal droit.
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escadrin |
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…Annexe :Milan le 11 mars 1913
L’art des Bruits – Luigi Russolo |
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Il y a là comme une matière de poésie métallique qui cherche à vous envelopper. Impressionnant…
Merci !
Belle création, maestro, bravo ! J’ai déjà entendu grincer des portes, gémir des grilles de cimetière, péter des ruminants (et autres mammifères), hurler des stades de foot, vociférer les Hitler et ses affidés, pétarader des meules de jeunes branleurs – j’en passe. Mais rien des escaliers. Faut dire que celui-là sonne comme un stradivarius, modèle contrebasse. John Cage s’en trouve honoré. Et Diderot ajouterait un chapitre à son « esprit de l’escalier ».
Et au fait : la bonne année ! Pourvu que nos voeux y contribuent…
Merci pour l’écoute et merci pour cette liste de sons à encore récolter…
Pour les ruminants il est heureux que j’ai cessé de fumer !
La bonne année à toi aussi et je pense qu’avec un bel effort d’imagination on devrait s’en sortir !!!
« C’est simple mais il fallait y penser ». Bravo.
Merci !!!